Quels sont les gaz à effet de serre ? Source : Jean-Marc Jancovici, membre du Comité de Veille Ecologique de la Fondation. Site perso.
L'activité humaine produit deux émissions qui ont une influence sur ce qui se passe dans l'atmosphère :
des gaz appelés "gaz à effet de serre" (de manière générale, tout gaz qui absorbe des infrarouges est un gaz à effet de serre) qui contribuent, comme on l'a vu, à réchauffer la planète,
des précurseurs d'aérosols.
Les gaz à effet de serreNous avons vu que les deux principaux gaz à effet de serre sont :
la vapeur d'eau (H2O),
le gaz carbonique (CO2).
Il en existe d'autres. Certains sont "naturels", c'est-à-dire qu'ils étaient présents dans l'atmosphère avant l'apparition de l'homme, d'autres sont "artificiels" : il s'agit de gaz industriels qui ne sont présents dans l'atmosphère qu'à cause de l'homme.
Les autres gaz "naturels" à effet de serre sont :
le méthane (CH4), qui n'est rien d'autre que... le gaz naturel de nos cuisinières,
le protoxyde d'azote (N2O), nom savant du.... gaz hilarant (qui ici ne l'est plus tellement),
l'ozone (O3), forme particulière de l'oxygène.
Les principaux gaz industriels à effet de serre sont les halocarbures (formule générique de type CxHyHalz où Hal représente un ou plusieurs halogènes) : il s'agit d'une vaste famille de gaz obtenus en remplaçant, dans une molécule d'hydrocarbure (le propane, le butane, ou encore l'octane, que l'on trouve dans l'essence, sont des hydrocarbures), de l'hydrogène par un gaz halogène (le fluor, le chlore...). Les molécules ainsi obtenues ont deux propriétés importantes pour nous :
Elles absorbent très fortement les infrarouges, beaucoup plus que le gaz carbonique.
Elles sont très "solides" : la partie la plus "énergique" du rayonnement solaire (les ultraviolets et les rayons cosmiques) met très longtemps à "casser" ces molécules une fois qu'elles sont dans l'atmosphère ; elles y restent donc (dans l'atmosphère) très longtemps.
Il existe également un autre gaz industriel que l'on mentionne souvent dans les milieux spécialisés, l'hexafluorure de soufre (SF6). Il n'est pas d'utilisation banale mais est encore plus absorbant pour les infrarouges et résistant à la partie "dure" du rayonnement solaire que les halocarbures.
Quels sont les gaz qui font le plus d'effet de serre et d'où viennent-ils ?
Le gaz qui fait le plus d'effet de serre est... la vapeur d'eau
Répartition des contributions à l'effet de serre des différents gaz présents dans l'atmosphère en 1992. Source : GIEC
Mais si l'on se limite à l'effet de serre d'origine humaine, que l'on appelle parfois effet de serre "additionnel" (parce qu'il se rajoute à celui d'origine naturelle), ou anthropique, il est causé :
pour 65% par le gaz carbonique. Il y a bien sûr des émissions naturelles (notre respiration, celle des animaux, une partie de la putréfaction, les incendies naturels...).
Le gaz cabonique venant des activités humaines (on parle d'émissions anthropiques, c'est-à-dire provoquées par l'homme) provient :
• pour l'essentiel de la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz),
• un peu de certaines industries (par exemple pour la production de ciment),
pour 20% par le méthane. Le méthane est un gaz (c'est le fameux "gaz naturel") qui se forme dès qu'un composé organique (un animal, une plante) pourrit, particulièrement si cette putréfaction se passe sans air (en fait sans oxygène), par exemple au fond de l'eau ou sous terre. Les réserves de gaz naturel ne se sont pas formées autrement que par la décomposition, il y a très longtemps, de plantes et d'animaux. Une partie du méthane présent dans l'atmosphère est donc d'origine parfaitement naturelle : ce n'est pas l'homme qui est responsable du pourrissement !
Mais l'homme y rajoute sa part. Le méthane d'origine humaine provient :
• de l'élevage des ruminants (vaches, moutons, chèvres, yaks...), car leur digestion inclut de la putréfaction,
• de la culture du riz, car les zones humides en général émettent du méthane (comme nos marécages : les feux follets ne sont rien d'autre que la combustion spontanée du méthane produit au fond des marécages, là où les plantes pourrissent sans air),
• des décharges d'ordures ménagères (encore le pourrissement) et du compostage,
• des exploitations pétrolières et gazières, à cause des fuites de gaz naturel.
pour 10% par les halocarbures (pas d'émissions naturelles). Ces gaz sont utilisés :
• auparavant comme gaz propulseurs (les fameux CFC de nos bombes aérosol d'insecticide ou de "sent-bon"), maintenant progressivement interdits par la convention de Montréal car ils sont aussi responsables de la diminution de l'ozone en haute altitude,
• actuellement comme gaz réfrigérants (dans les systèmes de climatisation et les chaînes du froid) ; les émissions proviennent désormais essentiellement des fuites et mise à la décharge des systèmes de climatisation,
• dans certains procédés industriels (fabrication de mousses plastiques, mais aussi… de composants d'ordinateurs).
pour 5% par le protoxyde d'azote (N2O). Pour ce gaz il y a aussi des émissions naturelles qui proviennent essentiellement des zones humides (et aussi...des termites !). La part "humaine" (anthropique) provient :
• de l'utilisation des engrais azotés en agriculture,
• de certains procédés chimiques.
pour environ 5% par l'ozone (O3) troposphérique. L'ozone est une variante de l'oxygène (une molécule d'ozone comporte 3 atomes d'oxygène au lieu de 2 pour le gaz "oxygène" normal) qui est naturellement présent dans l'atmosphère. Selon l'endroit où il se trouve il nous intéresse beaucoup ou il nous est nuisible :
• dans la haute atmosphère, où l'on parle d'ozone stratosphérique (la stratosphère est la couche de l'atmosphère située entre 10 et 50 km d'altitude) il arrête les ultraviolets du soleil ; il nous y est très utile (sans cette couche d'ozone stratosphérique la vie n'existerait peut-être pas sur Terre),
• dans nos villes, il est un polluant local très agressif ; il n'y est donc pas souhaitable. L'ozone troposphérique (la troposphère est la couche la plus basse de l'atmosphère, celle qui "touche" le sol) est l'un des composants de la pollution locale, et provient indirectement de la combustion d'hydrocarbures. Ce terme de l'effet de serre est donc - outre le CO2 - une conséquence du transport (terrestre, mais aussi aérien, on y revient plus loin).
Depuis le début de l'ère industrielle, c'est-à-dire depuis l'année 1750 environ, ce que nous avons mis dans l'atmosphère a pour effet d'introduire un "forçage radiatif" de l'ordre de 1% du rayonnement reçu.
Dit autrement, à travers ses émissions de gaz à effet de serre l'homme a modifié la situation "comme si" le soleil avait augmenté sa puissance de 1%. Cela peut paraître peu. Pourtant, compte tenu des énergies considérables qui sont en jeu, de la fragilité de certains équilibres naturels, et du fait que ces effets agissent sur de longues périodes, c'est très significatif pour notre avenir, comme on le verra plus loin.